Rotor Jambreks est un homme à tout faire. Guitariste, chanteur, et batteur, il réalise un One-man band explosif sous fond de rock du Tenessee breton comme il aime à décrire sont style. Les petites salles ne lui font pas peur et son accent est l'un des plus retoutable de l'Ouest. C'est donc un artiste plein d'humour et de talent qui à accepté de répondre aux questions de Vacarm.net.
Pourquoi Rotor Jambreks?
C'est une excellente question, et je te remercie de me l'avoir posée. Pourquoi Rotor Jambreks, c'est à la fois simple et compliqué. mais c'est quand même surtout compliqué. il y a des facteurs très pratiques et d'autres atrocement philosophico-pompeux qui se sont mélangés et amalgamés pour en arriver à cet état de fait… bon, déjà, sur un plan pratique, quand j'ai quitté Brest pour Lorient il y a 2 ans, je ne connaissais quasiment personne dans la ville aux cinq ports… et surtout pas de musiciens. Enfin, pas de musiciens actifs et tout. donc bon. Comme j'avais cette idée de faire homme-orchestre qui traînait depuis 6 mois déjà, ça a été le facteur déclenchant, parce que je savais que j'allais avoir de la disponibilité dans mes premières semaines lorientaises pour m'attaquer à un projet neuf. après, sur un plan philosophico-pompeux, je dois avouer que y'avait aussi l'idée de se jeter seul dans la fosse aux lions pour voir si je pouvais m'en tirer. "Ce qui ne te tue pas te rend plus fort", a dit Nietzsche (mais il a oublié de se prononcer sur l'agonie ("vivant mais mort", a dit Gérald De Palmas, autre grand philosophe), quoique je ne pense pas être actuellement à l'agonie (mais il fallait quand même signaler cet oubli (ce qui est donc fait). Aujourd'hui, je peux soulever des haltères de 2 kilos, au lieu de 1 auparavant. Je suis donc plus fort. CQFD.
Ca part d'une idée simple : réussir à tenir un show tout seul avec une grosse caisse, une caisse claire, une guitare, et ma gueule. après se greffent pas mal de choses, et principalement l'idée que le public fait partie du concert autant que moi. Si le show est velu et que le public a participé, c'est gagné. Après, musicalement, j'essaye de faire en sorte que ça navigue entre rock, soul et blues, avec des gros coups d'œil dans le rétroviseur mais sans l'intention d'être une parodie de ce qui a été fait dans les années 50-60…
D’où viens-t-il, comment-a-t-il été crée?
Très concrètement, je viens de chez moi (le Tennessee breton), où j'ai été créé par mes parents, dignes descendants d'une famille de saltimbanques dont les racines se trouvent quelque part entre Pologne et Slovaquie, en Europe centrale… ensuite, sur le côté homme-orchestre, c'est évidemment une idée qui ne m'est pas tombée du ciel, mon premier contact avec cette forme étant lié à Bob Log III connu d'abord à l'époque de Doo Rag. Ensuite, je suis tombé sur Hasil Adkins et le rennais Mr. Bonz. Et après, une fois que j'ai un peu commencé à jouer, je me suis rendu compte que y'avait plein d'autres gens qui fonctionnaient sur ce mode… autant en France (King Automatic, Bud McMuffin, Sheriff Perkins…) qu'à l'étranger (et notamment au Brésil !).
Qui se cache derrière ce personnage?
Je vais te décevoir, mais ce n'est pas un personnage. C'est très sérieux. très très très sérieux. Très très très très très très sérieux.
Est tu seul aussi pour composer tes chansons ou tu fait appel à des avis extérieurs?
Des avis extérieurs ne sont pour l'instant intervenus que sur la toute fin de la "chaîne de production", pour faire dans le taylorisme, le fordisme, et autres joyeusetés. C'est juste sur les pré-productions que j'ai subi le feu roulant des critiques, pour des remarques portant plutôt sur les arrangements et l'interprétation. Pour la création, je préfère fonctionner seul, à la maison, et garder un contrôle total.
Ca va peut-être évoluer au fil du temps, je n'en sais rien, mais pour l'instant, je préfère que le concert reste 100% bio. Pas de sons de synthèse, et bien sûr pas de sons OGM. Pour une question de liberté, principalement. Si je suis tenu par une pédale de loop, ça suppose de se synchroniser avec elle, d'avoir de bons retours pour bien l'entendre (ce qui n'est pas le cas sur tous les concerts, notamment en bar)… bref, d'être contraint par elle. j'aime l'idée de pouvoir arrêter un morceau en plein milieu si nécessaire, ou de faire des pauses plus longues que prévu si ça me chante et si ça a du sens.
Ton CD est sortit il y a peu, es-tu satisfait des ventes pour l’instant?
Je vais encore te décevoir mais je n'ai aucune idée du nombre de CD vendus pour l'instant… à vrai dire, ça ne me défrise pas trop, parce que pas grand monde (à part genre la famille et les potes) n'attendait cet album, et que le gros du boulot pour le faire connaître et entendre (et donc éventuellement vendre) reste à faire. Que 40 ou 100 exemplaires soient partis en première semaine, c'est pas encore trop important. on pourra faire un bilan plus sérieux dans 6 mois, après la promo, les concerts hors de Bretagne, et ce genre de choses.
As-tu eu des collaborations pour cet album?
Trois collaborations sur le disque, tout d'abord avec la planturo-talentueuse Nola# du groupe Nola's Noise… rencontrée sur le tremplin Jeunes Charrues du pays de Vannes. Elle fait un duo particulièrement torride avec moi sur un morceau écrit ensemble, "Stink-o-Drama". Son groupe sera lui aussi aux Transmusicales cette année, d'ailleurs. allez les voir. C'est grâce à elle que j'ai rencontré Mickael Plihon, excellent arrangeur de son état, qui gère une section cuivres, la MBS. Il s'est occupé de faire les arrangements sur 3 titres, et il a sélectionné deux de ses coéquipiers pour venir en studio à Lorient. On va d'ailleurs se revoir aux Trans, puisque la section cuivres sera pour la première fois sur scène avec moi. Et puis, last but not least, pour citer Goethe, David Chevalier joue de l'harmonica sur un titre. lui aussi rencontré via les Jeunes Charrues, avec pas mal de commentaires et autres messages sur MySpace dans l'affaire également. 2 mètres de talent avec des dreadlocks, et une âme vendue au diable pour apprendre l'harmonica. Il joue habituellement avec Dizzy Town Blues.
Penses-tu exporter à l’étranger le concept R.Jambreks?
Aaaaah ça… je ne m'attends à rien, mais je suis prêt à tout. je sais qu'une partie de la stratégie de mon label (Last Exit Records) consiste à se développer à l'international avec un schéma ambitieux d'édtion et de distribution un peu partout dans le monde. Pour peu que le disque arrive en magasins dans un pays ou un autre, ça peut éventuellement ramener des concerts, et donc, on irait jouer là-bas. Mais c'est hypothétique, tout cela. donc, oui, j'aimerais bien jouer à l'étranger, mais si ça ne se fait pas, c'est pas grave, on a beaucoup de choses à faire en France.
Que penses-tu des groupes qui ne sortent plus de CD mais vendent leur musique en ligne?
Mon album est en vente en CD dans les magasins comme sur les plate-formes de téléchargement… C'est pas vraiment un choix, le label fonctionne comme ça, mais ça me va plutôt bien. Le boulot de Last Exit est quand même de mettre son catalogue à disposition du plus grand nombre de personnes possible… et ça passe aussi par le Net. Après, le fait de rester en distribution uniquement numérique, je n'ai pas d'avis définitif sur la question. Radiohead, Nine Inch Nails ou Saul Williams l'ont fait, mais avec une notoriété suffisante pour que ça serve de moyen de publicité, avec des relais dans les médias pour parler de l'opération. Pour quelqu'un comme moi, quasiment inconnu, faire du 100% numérique, ça n'a pas beaucoup de sens. D'une part, parce que les ventes de morceaux en ligne restent quand même peu nombreuses et que le label comme le producteur doivent malgré tout réussir à rentrer dans leurs frais. D'autre part, parce qu'on a eu l'ambition de faire un joli digipack avec un joli dessin du dessinateur Laurent Astier. Et jusqu'à preuve du contraire, ce genre de choses ne se télécharge pas.
Quelle est ta meilleure expérience de scène?
A ce jour, je pense que le meilleur souvenir, c'est le festival Toulao, sur le Méné-Bré, à côté de Guingamp, en 2007. Je faisais la fermeture de la soirée, j'ai du arriver sur scène à 1h ou 2h du matin… et Côtes-d'Armor oblige, l'ambiance était particulièrement festive et y'avait du monde. J'ai jamais pris autant d'énergie dans la gueule. Terrible!!
Penses-tu créer un groupe après Rotor quand tu aura usé toutes les ficelles de ce personnage?
Sachant que je ne suis pas un personnage, ni un numéro, mais un homme libre, je peux néanmoins te dire que je ne doute pas qu'à un moment ou à un autre, je vais toucher certaines limites de l'exercice. et qu'on aura besoin de trouver des solutions à ça. Ca peut passer par des musiciens additionnels (on va d'ailleurs tester ça aux Trans d'abord, en one-shot, et plus sérieusement fin 2009), ça peut passer par autre chose aussi, pourquoi pas… mais pour l'heure, la question ne se pose pas franchement.
Es-tu atteint par “la crise” ?
La crise ? Bon. Si tu parles de la crise du disque, je ne pense pas être atteint parce que je n'en suis qu'à mes débuts et que je sais que ce n'est pas avec les ventes de disques que je vais finir de rembourser le prêt pour la véranda. D'ailleurs, le label est très conscient du rétrécissement du marché et il envisage son développement par d'autres moyens que les ventes de disque stricto sensu. Sinon, si tu parles de la crise financière, j'ai grave les boules, mon portefeuille d'actions qui valait plus de 3 millions de dollars a perdu la moitié de sa valeur, et je n'ai toujours pas reçu le parachute doré que j'avais commandé. Ca craint.
Bon, je souhaite que tu reçoives rapidement ton parachute doré alors !
Un mot pour tes fans ?
En toute simplicité : big up !
Merci à Rotor Jambreks pour cette interview et au label Last Exit Records.
Interview/photo : SiN
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