La grosse claque musicale du festival Mythos, ça a été eux. Probablement la plus grosse claque musicale de 2013, également. Quelques heures avant de conquérir les Rennais qui avaient eu la chance d’avoir eu un billet, nous avons croisé le temps d’un interview les cinq compères de Fauve.
Bonjour.
Salut, on s’appelle Fauve.
Comment vous décririez votre musique, ce que vous faites en live ?
-C’est très large comme question. Alors sinon, en live, on est sur scène, on joue des instruments et ça fait des sons. Et on parle par dessus. Ah et il y a des projections vidéos, ça c’est important.
-En fait c’est comme les mp3, mais en moins bien. Parce qu’on joue moins bien que sur les mp3.
Enfin ça bouge un peu, c’est plus sympa.
-Ouai, t’as un peu des deux comme ça. Par rapport à une vidéo YouTube par contre, c’est presque aussi bien, enfin un poil moins bien parce que c’est aléatoire. Ça dépend des fois en fait. Il y a un poil plus d’humanité dedans, donc c’est déjà plus marrant.
-Et aussi on essaye d’être dans le rythme sur scène, on fait genre on bouge, on sait danser.
FAUVE ≠ NUITS FAUVES by FAUVEcorp
Est-ce que vous pouvez nous parler un peu de l’EP qui va sortir le 20 Mai?
-À balle ! Alors, il sort le 20 Mai, ça fait 6 mois qu’on le prépare dans nos chambres et là il va sortir on est trop contents. En gros, c’est un EP 6 titres, des titres pas encore sortis pour la plupart. Il y a une jolie pochette avec les paroles dedans. On s’est autoproduits sur cet EP, en s’associant avec une boite de distribution pour le mettre dans les magasins. Et on en est super contents, très fiers, je crois qu’on peut dire ça.
-C’est cool d’évacuer un truc, c’est un aboutissement. Ça demande beaucoup de travail, surtout que tous les membres du groupe, jusqu’à il y a très peu de temps, avaient un taf, donc ça a vraiment été fait dans les chambres, la nuit, le week-end, avec les moyens du bord. Et en fait, c’est cool parce que cet EP nous ressemble, et c’est chouette de concrétiser ça pour passer à autre chose. C’est assez impressionnant au final, on vient de recevoir les premiers exemplaires, et avoir ton truc sous les mains, c’est assez bizarre. Avec des cds promo qui ont été fait pour la promo, enfin t’as ton cd promo, comme «un vrai groupe» quoi. C’est assez émouvant. Et on est super contents de ce qu’on a fait, après t’as forcément des trucs que tu aimerais retoucher, t’es jamais à 100% satisfait mais au moins c’est évacué.
Vous mettez sur internet que Fauve n’est pas encore un projet à l’âge adulte. Qu’est-ce que vous avez envie de faire, quand vous serez grand ?
-Pour l’instant on a surtout développé ce qu’on a eu le temps de développer, et le développement futur, à l’âge adulte comme tu le dis et donc comme on a dû le dire, je pense que c’est à la fois sur la forme et sur le fond. Sur la forme, aujourd’hui on s’est développés surtout à travers la musique et les chansons, et les images étaient au service des textes. Dans le développement qu’on imagine, on aimerait bien aller sur un spectre de disciplines et d’interventions pour développer un projet de Fauve qui serait beaucoup plus large. On pourrait faire des trucs bien plus variés, peut-être sortir complètement de la musique, à terme pourquoi pas un bouquin ou un film, ça peut aller très loin, du moment que ça reste cohérent avec ce qu’on a toujours fait. Les idées qu’on va défendre on peut les décliner sur pleins de supports différents. Ça c’est pour la question de la forme, pour la question du fond, c’est en évolution permanente et constante, parce que ça suit un peu le rythme de nos vies, et les idées se précisent au fur et à mesure qu’on avance, il y a des choses qu’on a pu faire au début, avec des chansons comme «Saint-Anne» ou même «4000», sur lesquelles on se cherchait beaucoup, et que l’on considère maintenant un peu comme les deux extrêmes de ce qu’on a fait.
-Dans cette grande anthologie de 4 chansons qu’on a fait (rires).
-Donc oui, «4000» dans ce qu’il y avait de plus pop et «Saint-Anne» dans ce qu’il y avait de plus vénère. Sur la forme, on aimerait faire des trucs larges et variés, et sur le fond, continuer à préciser, à affiner le propos, mettre plus de mots précis sur plus de choses.
-C’est ça qui est compliqué dans les textes. T’as une préoccupation, une angoisse, ou même un joie, et tu as besoin de la coucher sur la bande ou d’en faire une chanson, et ça prend beaucoup de temps, de mettre des mots justes, c’est un peu comme une thérapie, tu parles, et ça vient, et en fait, le rêve serait d’arriver à travailler et travailler pour que le process soit beaucoup plus fluide et qu’il y ai un processus permanent d’évacuation, comme ce qui se fait dans le rap. Ça c’est une évolution vers laquelle on aimerait aller. Dans le fond, aussi d’affiner le propos, de parler des choses de façon plus fine et précise, en explorant la vie dans ce qu’elle a de plus large, et ça c’est un travail permanent. Tu vois, il y a des trucs qu’on écoute, de ce qu’on a fait, on se dit que c’est pas encore ça. On avait besoin de dire un truc alors on l’a dit.
-
Tout simplement, de manière plus basique, c’est juste l’idée de revendiquer le fait qu’on soit en développement, qu’on soit au début de ce qu’on a imaginé pour Fauve. Ça nous permet aussi de nous dédouaner d’une certaine pression. Parce qu’on a parfois l’impression d’être au centre d’une attention qu’on a pas voulu, pas demandé, et c’est juste une façon de revendiquer que l’on a fait que 4 chansons, 10 concerts, c’est cool ça fait super plaisir d’être là mais il faut y aller doucement. C’est pour ça qu’on dit qu’on est encore enfants, on est encore en développement, c’est ça surtout, l’idée qu’il y a derrière.
FAUVE ≠ 4.000 ÎLES by FAUVEcorp
Votre musique fait beaucoup de référence à cette idée de «retour à l’humain», de besoin de retrouver le lien, et vous n’êtes pas les premiers artistes à dire ça récemment, est-ce que vous pensez que c’est une préoccupation moderne ?
-Quand même, pour la petite histoire, les seuls référents qu’on avait quand on a commencé à écrire, c’était nous-même, nos vies, notre petit cercle, ces petites échelles qu’étaient nos vies. Donc c’était nous, directement, et nos proches. On parle de choses qu’on connait et qu’on vit, il n’y a pas de fiction du tout dans ce qu’on dit. Et on se parle beaucoup à nous-même, à nos proches, il y a quelque chose de très personnel. Et puis on est vachement surpris par les réactions autour de Fauve. Et cette question elle revient souvent, et on a eu du mal à comprendre pourquoi on nous la posait et si il y avait une réponse. Et on a réalisé que quand tu as une vie, «Banale», puisqu’il n’y a pas vraiment de vie banale, mais une vie absolument normale et que tu la racontes avec tout ce qu’elle a de dur, de routine, de dureté des rapports entre les gens, peut-être, ce qui est logique, c’est que les gens qui ont la même vie ressentent ça comme familier. C’est presque mathématique au final. Plus il y a de gens qui ont la même vie que toi plus il y a de gens qui se reconnaitront dans ce que tu dis. Mais à la base c’est tellement pas pensé comme ça qu’on a mis du temps à comprendre la question.
-Après, je sais pas si c’était la question. Enfin la question c’était l’idée que d’autres groupes disent la même chose que nous ?
Oui, d’autres groupes tiennent un peu le même discours, j’ai eu par exemple cette semaine un artiste qui me disait qu’il ne comprenait pas la séparation entre les artistes et le public.
-C’est intéressant, on partage grave cette idée. Après tant mieux que d’autres le pensent, mais moi j’ai pas ressenti une réelle tendance par rapport à ça et aux artistes que j’ai eu l’occasion d’écouter, comme par exemple Lescop, qui passe en ce moment, ou La femme qui était là hier, et des artistes qu’on a pu croiser sur des concerts mais qu’au final on ne connait pas très bien, ils font des trucs très bien mais j’ai pas ressenti ça, j’ai pas l’impression que ce soit une tendance.
-Évidemment par contre c’est une tendance, pour le coup, sociétale. Nous on le voit à notre échelle, avec les signaux qu’on reçoit en réponse à ce qu’on fait, je reviens sur ce que je disais mais il y a vraiment des gens qui nous disent «nous aussi on en a marre d’être seuls» en fait. Et j’ai l’impression que oui, ça c’est une tendance, mais on ne l’avait pas du tout percutée. On parle pour nous, enfin, on est pas heureux dans nos vies, on va pas s’ouvrir les veines non plus, mais on parle de ça et peut-être que oui, au fond, c’est un truc qui touche les gens, qui est actuel.
-Peut-être que si on avait grandi pendant les 30 glorieuses ça aurait été différent. Tu sais comme on nous l’apprend en 3ème, où il y avait quasi le plein emploi, et des trucs cons mais pas des loyers comme on voit aujourd’hui. Nous on est pas en train de remettre en question la société telle qu’elle est, on est confrontés nous en temps qu’individu, dans nos vie, à des choses un peu difficiles, les loyers hors de prix, que les rapports qu’on a dans la vie avec le monde extérieur sont un peu durs. Ça te fait souffrir et t’en parle, et voilà. Peut-être que c’est actuel par rapport à il y a 30 ans, après peut-être pas plus par rapport à il y a un an.
FAUVE ≠ SAINTE ANNE by FAUVEcorp
Vous avez un morceau qui s’appelle «St Anne», et qui est quand même le nom de la place emblématique de Rennes, vous avez visité un peu la ville ?
On a pas eu l’occasion de la visiter mais on était déjà venus à Rennes, faire des concerts. On avait tous des projets différents avant Fauve. On avait joué au Mondo Bizarro il y a longtemps. On est arrivés cet après-midi, on a fait les balances et là on est là, mais on a toute la soirée et demain matin pour visiter.
Un dernier mot pour finir ?
-«Haut les coeurs»
-Bref, on va en rester à : «42»
Merci à Fauve pour leur gentillesse et leur accueil, ainsi qu’à Morgane pour avoir organisé cette rencontre.
Propos recueillis par Colin Fay pour Vacarm.net. Crédit Photo : Laetitia Portier.