Photos : © Nikolas Ernult Photographe Indépendant – Site Internet
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Mort et enterré suite aux déboires judiciaires de Tripp Rex Einsein – Static-X – ainsi qu’aux nombreux projets annexes de Joey Jordison, Murderdolls marquait un retour inespéré l’été dernier. Un disque considéré comme une revanche par la formation Américaine, et aujourd’hui prétexte à une première véritable tournée Française. Rare sur les scènes hexagonales, le quintet marquait un premier arrêt par Bordeaux. Une date attendue cependant partiellement marquée par les problèmes comportementaux de Jordison, visiblement levé du pied gauche. Si le Rock’n’Roll de Murderdolls reste synonyme d’imprévu et d’urgence Punk, la formation livre ce soir-là une quasi-contre performance, entachée par l’attitude imprévisible de son guitariste star. Retour sur un rendez-vous manqué.
Calibrée au millimètre près, l’organisation de début de soirée se charge de rappeler à la foule tassée aux avant-postes la rigueur made in America. Déboulant sur scène à 21 heures pétantes, Marionette dispose de trente minutes montre en main pour dérouler ses brûlots. Top chrono. Un timing serré mais suffisant, le quintet parvenant à s’imposer sans pour autant transcender l’assistance. Relativement méconnu mais déjà auteur de trois albums distribués par Listenable, le groupe balance un mélo-death sans grande originalité. Reste une belle efficacité, en partie inhérente à un sympathique melting-pot d’influences convenablement digérées. Marqué au fer rouge du sceau de l’école de Göteborg, Marionette emprunte tous azimuts : Black-Metal, Visual Kei, encore Metalcore. Si tout n’est pas toujours du meilleur goût – les claviers, plutôt horripilants –, l’ensemble tient la route et bénéficie d’une mise en place impeccable. Récemment intégré dans les rangs, le nouveau chanteur Alexander Andersson s’en sort avec les honneurs. Plutôt charismatique, le frontman passe même quelques passages en voix claires plutôt bien troussés, tout en témoignant parallèlement d’une belle performance en matière de hurlements rauques et virils. A l’aise sur les planches, le quintet joue pleinement la carte de la théâtralité – le look gothico-romantique savamment travaillé – et parvient à livrer un set accrocheur. Plutôt cliché mais relativement appréciable en guise de warm-up. Place aux maitres de cérémonie.
Monté en à peine plus de quinze minutes, le plateau semble rapidement prêt à accueillir les Murderdolls. Il faudra pourtant patienter un quart d’heure supplémentaire. L’heure, c’est l’heure, et rien ne semble vouloir troubler le timing très précis imposé par les Américains. A défaut d’animation – la scène reste désespérément vide –, le staff se fend d’une petite rétrospective sonore du film horrifique des sixties / seventies, bande originale de Psychose en tête de liste. De quoi assurer une transition plutôt réussie avec l’introduction du set, lancée sur le glauque « The World According To Revenge ». Grimés en psycho-zombies d’opérette, les musiciens lancent les hostilités avec une énergie communicative. Leur Horror-Punk passe le cap du live sans accroc particulier : taillés pour les planches, les morceaux du quintet suintent le second degré imbibé au whisky frelaté. Grossièretés en veux-tu en voilà, riffs costauds, solos fulgurants, Murderdolls balance sans demi-mesure. Particulièrement en place, le groupe s’appuie notamment sur la maitrise de son nouveau lead-guitariste – Roman Surman –, technicien particulièrement vivace en matière de branlette de manche. Branché sur 220 volts, le furibond Wednesday 13 mène le tout à la baguette, éclipsant totalement un Joey Jordison amorphe et peu concerné. Quelques sourires figés, un ou deux signes de ci et là, le musicien est visiblement à côté de la plaque, et se contente de reproduire ses parties sans entrain particulier.
Une attitude « je m’en foutiste » qui amène Jordison à envoyer sa guitare dans le kit de batterie au cours du cinquième morceau. Démarré tambour battant par un redoutable enchainement extrait du très bon Women And Children Last – dont un « Chapel Of Blood » bien membré –, le show se voit interrompu à l’issu d’un « Twist My Sister » pourtant chargé de réveiller le côté nostalgique des fans de la première heure. Black-out total. Les rumeurs vont bon train : Jordison aurait refusé de faire les balances, exigé un steak lors du repas de midi, détesterait le public Français… Officiellement, le guitariste aurait rencontré de sérieux problèmes de retours et d’acouphènes. Qu’importe, la troupe regagne ses positions et relance le spectacle. Dans sa besace, un furieux premier single – « My Dark Place Alone » – chargé de recrédibiliser le quintet. Plus efficace que les pseudos « problèmes techniques » avancés en excuse, le morceau fait son œuvre, toujours mené par un Wednesday 13 charismatique au possible. Visiblement gêné, le frontman assure le spectacle pour deux. Peine perdue. Jordison quitte définitivement la scène dix minutes plus tard. Professionnel jusqu’au bout, Murderdolls tente de poursuivre sans ce dernier. Exfolié de sa guitare rythmique, le son manque cependant cruellement de dynamique, plus spécialement lors des envolées en solo, uniquement soutenues par le binôme basse / batterie. L’absence de Jordison empêche surtout la formation d’exécuter la plupart de ses compositions, les quatre musiciens s’affranchissant de trois morceaux supplémentaires avant de quitter la scène. Reste un « Dead in Hollywood » efficace, ainsi qu’un « I Love to Say Fuck » dynamité par la prestation du freak Wesnesday 13, qui assure une chorégraphie très « Rihannesque » à l’aide d’un parapluie estampillé de son slogan outrancier. Fun et décomplexé. Rideau, le groupe détale après 45 courtes minutes de concert, exception faite d’un Roman Surman qui acquiesce quelques sourires et gestes d’excuses. Etrangement, l’assistance conserve son sang-froid et quitte les lieux dans le calme.
Malgré les soucis inhérents à la désertion de son guitariste, les musiciens auront tentés par tous les moyens d’assurer une performance habituelle. Inébranlables, les compagnons de route de Joey Jordison ont livré, chacun de leur côté, un spectacle haut en couleur et résolument professionnel. Mention spéciale à son frontman, qui aura su témoigner d’un sens du spectacle aiguisé comme une lame de rasoir et qui mériterait – aujourd’hui plus que jamais – une large reconnaissance. Partie remise.