{multithumb}Après la rumeur propagée par l'organisation des Transmusicales de Rennes il y a quelques années sur la venue du révérend puis le démenti du groupe, autant dire que Marilyn Manson et ses nouveaux acolytes de scène étaient plus qu'attendus en région bretonne. Malgré des conditions climatiques variables, le public a sans surprise répondu présent en masse, le terrain accueillant les festivités grouillant de monde comme jamais pour cette édition 2007. Un drapeau géant dissimule la scène, il sera vain d'essayer d'en savoir plus sur le nouveau show du personnage avant l'ouverture des hostilités.
L'effet de surprise est donc total lorsque retentissent les première notes d'une introduction baroque sur laquelle s'enchaîne directement le très bon « If I Was Your Vampire », titre d'ouverture du dernier méfait en date Eat Me, Drink Me. La troupe se déplace certes en festival, mais ne lésine pas sur le côté visuel pour autant. A la fois minimaliste, romantique mais néanmoins impressionnant, le décor rappelle bien évidemment l'ambiance générale du nouvel album ainsi que les nouveaux thèmes abordés par un Manson presque assagi. Les candélabres se dressent des deux côtés de la scène, accompagnés d'un écran géant qui diffusera tout le long du concert des images glamours (les lèvres pulpeuses reprenant les mots du grand échalas) ou rappelant parfois les anciennes tournées (le drapeau américain brûlé sur l'hymne « Disposable Teens »).
Plus de doute possible, l'Antéchrist qui n'aspirait qu'à la critique du système Américain semble désormais bien mort. Manson effectue aujourd'hui un véritable virage dans sa déjà prolifique carrière, adoptant au passage un visage bien différent. Certes, quelques résidus subsistent de ci et là, le bonhomme ne pouvant s'empêcher de faire le clown, de montrer ses fesses à tout bout de champ, se tripoter les parties génitales sans modération le pantalon sur les chevilles ou encore d'effectuer quelques galipettes sur la longue avancée qui lui permet de se rapprocher au plus près de son public. Mais on sent que Marilyn Manson aspire désormais à des choses résolument moins provocatrices, tant celui-ci semble parfois donner l'impression de remplir un contrat l'engageant à un minimum d'extravagance ainsi qu'à un déballage d'artifices plus ou moins dispensables, bien qu'amusants (on retiendra à ce titre le couteau-micro, très tendance et déjà adopté par Rammstein). Les morceaux extraits du dernier opus occupent en conséquence une grande partie de la set-list, avec pas moins de sept interprétations, soit une bonne moitié des titres joués. Les musiciens semblent prendre un réel plaisir sur ces nouvelles composantes, au contraire de certaines vieilleries jouées sans réelle conviction, à l'image d'un « mOBSCENE » qui reposera en grande partie sur l'exceptionnelle réactivité d'un public conquis d'avance. Manson aurait probablement gagné en cohésion à jouer d'avantage sur les similitudes entres les dernières compositions et celles de Mechanical Animals, quitte à oublier les singles de Holy Wood qui tranchent radicalement au niveau des ambiances et surtout des paroles. En lieu et place de cela, le révérend livre un concert ayant fâcheusement tendance a tourner vers un académisme relativement lassant, malgré un bel enchaînement de brûlots marqués par le glam' rock en fin de set (« Heart-Shaped Glasses », « Tainted Love », « The Dope Show » ainsi qu'un toujours superbe et impeccable « Great Big White World »).
Dommage car l'interprétation du groupe reste relativement bonne, et le son plus que convenable pour un concert en extérieur. Mais le show pèche par ailleurs par un véritable manque de complicité ainsi que de charisme en ce qui concerne les acolytes du vampire, ceux-ci demeurant totalement effacés par leur chef de bande. Tim Skold, désormais à la guitare, se détache cependant d'avantage (sans doute en partie grâce à son apport désormais indispensable dans le processus de composition) et mène le show efficacement aux côtés du révérend, n'hésitant pas à s'avancer avec lui à la rencontre du public. Il en est tout autrement pour les trois autres instrumentistes, qui se contentent simplement de retranscrire leurs parties sans parvenir à imposer une présence scénique comme Twiggy Ramirez ou Madonna Wayne Gacy (désormais remplacé par Chris Vrenna suite à d'intrigants problèmes mentaux d'après les rumeurs). Seul rescapé d' Antichrist Superstar, « The Beautiful People » vient dynamiter le final sous un pluie de confettis blancs, se révélant bien plus efficace qu'un « Eat Me, Drink Me » mou qui permettra à Manson d'effectuer quelques dernières acrobaties sur une chaise géante afin de véritablement clôturer la prestation de ce semi-groupe.
Sur l'heure et demie qui lui était à la base réservée, Manson sera sans doute le seul artiste du festival à n'avoir pas débordé, celui-ci ayant même fait l'économie de presque dix minutes. Qu'en retenir ? Le concert demeurera indiscutablement convaincant et aura d'ailleurs largement contenté une bonne partie de l'assistance, mais peut-être en déca de ce que l'on aurait été en mesure d'attendre. Probable que Manson souffre aujourd'hui de la comparaison entre son glorieux passé et le début de cette nouvelle ère, et que le verdict aurait été tout autre avec une biographie différente. Brian Warner est désormais d'avantage lui-même que le personnage qu'il a imposé ces dernières années, mais semble encore prisonnier de celui-ci. Marilyn Manson n'est cependant pas mort, il a seulement effectué un changement en profondeur.