Avec un troisième album sorti chez Warp en août 2008, Blood, Looms and Blooms, Leila se devait de présenter ses nouveaux morceaux en live sur le territoire français. Et bien c’est chose faite ! Après un passage au festival Factory en octobre dernier, la productrice anglaise est donc revenue à Paris fin février dans le cadre de sa tournée européenne. Rendez-vous dans la salle intimiste du Café de la Danse pour la retrouver en compagnie de quelques uns de ses vocalistes, mais aussi du barcelonais Filastine, pour une soirée hautement électronique.
20H00. La salle se remplit au fur et à mesure, se tenant prête à accueillir le premier invité de la soirée : Filastine. Après quelques minutes supplémentaires d’attente, le producteur fait irruption sur une scène jonchée de machines et de percussions. Le live peut enfin commencer. Entre séquences prises sur le vif et bidouillages sonores, il révèle au public des compositions hybrides aux couleurs organiques et teintées d’influences diverses : hip-hop, dubstep, électro, world… Filastine entremêle les frontières au travers d’un voyage métissé, empruntant ses aspirations à l’orient comme à l’occident, sur une ligne symbolique reliant le nord au sud. Ce globe-trotter invétéré dévoile ainsi tour à tour plusieurs morceaux de ses deux albums, Burn It et Dirty Bomb, qu’il agrémente de rythmes batucada à l’aide de ses instruments de batterie et même d’un caddie de supermarché. Il s’accompagne également sur certains titres d’Amélie, violoncelliste française venue apporter ses cordes à l’ouvrage. Pour illustrer ce véritable concert-manifeste, un écrans surplombe la salle et diffuse au gré du parcours de l’artiste un mix de visuels et d’animations aux dénotations fortement anti-capitalistes. Que ce soit par le son ou l’image, Filastine croise donc les cultures par le biais d’un message musical mondial.
20H30. Une petite demi-heure s’écoule entre la fin du set de Filastine et l’arrivée de celle que l’on surnomme parfois la « princesse de l’electronica ». Dès son entrée, Leila Arab captive les esprits. A l’arrière de ses séquenceurs, son 16-pistes et autres inombrables machines, elle subjugue en effet les spectateurs au gré de ses manipulations. Elle introduit ainsi l'écoute et la vision au travers d'un univers mi-féérique, mi-synthéthique, qu'elle dépeint par le biais d'animations vidéos hypnotiques et qu'elle module tout au long de ses instrumentaux à la densité époustouflante : l'étourdissant « Mettle », le progressif « Mollie » ou encore le très aérien « Space Love » et son bruitage d'horloge entêtant. De Like Weather à Blood, Looms and Blooms, en passant par Courtesy of Choice, elle représente en live les meilleurs titres de sa discographie et se voit soutenir pour l'occasion par ses plus fidèles vocalistes. D'une part, sa soeur Roya Arab, avec qui elle collabore depuis ses débuts et qui amène par son chant quelques directions jazz et trip-hop à sa musique (« Daisies, Cats and Spacemen » et surtout « Different Time »). D'autre part, le charismatique Luca Santucci et sa voix soul, légèrement éraillée, pour des instants à la fois mélancoliques et romantiques (« Norvegian Wood », « Teases Me » et « To Win Her Love »). Une troisième figure inconnue s'impose, le moment d'une chanson, mais ne laisse que peu de souvenirs excepté celui d'une femme engoncée dans un justaucorps chrome et coiffée d'un chapeau beaucoup trop pointu… Bref, le public se délecte pleinement des expérimentations sonores de Leila et se laisse définitivement charmer par la créativité harmonique, les destructurations inventives et la justesse de son jeu.
A travers deux prestations tout aussi intenses que surprenantes, le Café de la Danse a réussi à prouver en un soir la qualité de sa programmation, notamment en termes de musiques électroniques. Ses visiteurs s'en sont d'ailleurs retrouvés émerveillés.
Un grand merci à Emelyne du Café de la Danse.