Pour sa propre survie, The Cure doit changer de peau. C’est d’abord au sein d’une pop synthétique que la mutation s’opérera, par le biais des hit-singles controversés « Let’s Go To Bed », « The Walk », et surtout « The Lovecats », titre surprenant à la rythmique influencée par le jazz et Les Aristochats de Walt Disney ; ces trois 45 Tours seront par la suite réunis avec leurs faces B sur Japanese Whispers, un mini album à l’intérêt plutôt discutable. Le succès populaire est au rendez-vous, bien que le public le plus fidèle des Anglais se retrouve quelque peu désorienté par cette simplicité d’écriture. Durant cette période de transition, Robert Smith en profite pour mettre définitivement un terme à ses activités d’avec Siouxsie And The Banshees (il réglera d’ailleurs ses comptes avec la chanteuse sur le cinglant « Shake Dog Shake »), pour lesquels il assurait occasionnellement les parties de guitares en live et en studio, tout en partageant en commun le projet parallèle (plus récréatif qu’autre chose) The Glove avec Steve Severin, le bassiste des Banshees.
Deux années suivant Pornography et une énième modification au sein du line-up, The Top, cinquième véritable opus, parait le 1er mai 1984. Un disque que Robert Smith présente aujourd’hui comme le projet solo qu’il n’aura jamais achevé (il joue la majeure partie des instruments et compose entièrement sept des dix titres). Aux couleurs parfois orientales et hispaniques, The Top apparaît telle une synthèse de la trilogie et des singles qui ont précédé sa sortie, en proposant dans la mêlée une nouvelle facette de son auteur. Toujours enclin aux références littéraires (Salinger dans « Bananafishbones » et Penelope Farmer dans « The Empty World »), Robert Smith renoue avec des textes travaillés et des sonorités évoquant le psychédélisme (« The Caterpillar », unique 45 Tours extrait) et les métaphores oniriques (« Birdmad Girl » dont le sujet reste pourtant des plus sombres).
Friand de toutes les expérimentations possibles (jusqu’à chanter complètement faux sur « Piggy In The Mirror ») et, dixit le principal intéressé, d’une surconsommation d’alcool et de drogue (on le ressent rapidement durant les quarante minutes d’écoute), Robert Smith accouche d’une musique difficile à classer, sonnant les prémices d’un groupe en constante évolution à chaque nouvel opus. Plus aéré que par le passé, plus pop, The Cure se décomplexe à travers le mélange des genres (l’agressivité de « Shake Dog Shake » et « Give Me It », la synth-pop conduite aux flûtes indiennes sur « The Empty World », l’oriental et planant « Wailing Wall » ou le minimalisme hypnotique de « The Top »), qui deviendra par la suite l’une de ses marques de fabrique. Pour sa part, le single « The Caterpillar » annoncera un soin particulier apporté aux clips vidéo, réalisés par Tim Pope.
01. Shake Dog Shake
02. Birdmad Girl
03. Wailing Wall
04. Give Me It
05. Dressing Up
06. The Caterpillar
07. Piggy In The Mirror
08. The Empty World
09. Bananafishbones
10. The Top