La révélation française des dernières Trans-musicales de Rennes a un nom imprononçable pour un francophone, qu'il soit breton, basque ou wallon. Il va pourtant falloir s'habituer à voir cette jolie maxime flamande, « roken is dodelijk », apparaître sur deux types de support : les paquets de cigarettes et les paquets à CD. Car aujourd'hui, le groupe lillois du même nom sort un deuxième EP, The Terrible Things, fort prometteur et annonciateur d'un album prévu à l'orée 2011.
Pour l'heure, c'est un défi excitant que lance Roken Is Dodelijk, pire que la vie quotidienne de Jack Bauer : se préparer le matin sur leur musique, soit en vingt-cinq minutes chrono. Si on est du matin, c'est sûrement jouable, mais ce n'est pas malheureusement pas mon cas. J'ai choisi de tenter l'expérience malgré tout. Le réveil est programmé sur « Holy War ». Je peux m'endormir. À 8h25, l'heure fatidique est arrivée. Il faut que je me force un peu à oublier mon réflexe pavlovien de coller une claque à mon réveil. Mais Roken n'a pas prévu un morceau trop agressif, heureusement. « Holy War » passe donc tranquillement, le temps de s'habituer à nouveau à la lumière du jour.
Cap sous la douche désormais. J'y file avec « King Of This Town », choisi pour figurer sur la compilation Indétendances de la FNAC, dans les oreilles. La piste est entraînante, joyeuse, avec ses montées tout juste grandiloquentes et délicieusement réjouissantes. Cela met de bonne humeur. La journée s'annonce bien. Pour le moment, même le timing s'avère très bon. Cinq minutes pour une douche, c'est ni trop, ni pas assez.
Il est l'heure de finir de se vêtir à la va-vite et d'aller faire un tour dans la cuisine pour mettre le café en route. Bol chaud bouillant sur la table, tartine en cours de beurrage salé, la première trempette a lieu pendant l'introduction de « The Terrible Things ». Comme un symbole de l'énergie qui revient dans les veines, le titre déploie sa vitalité. Je deviens à chaque gorgée plus attentif, presque lancé à plein régime. Le plus agréable dans l'histoire est de se mettre, inconsciemment, au diapason de la musique : le manger a lieu pendant les phases chantées, le boire pendant les doux « oh oh ».
Le petit-déjeuner n'est cependant pas encore fini lorsque « The Letter » a déjà montré ses dents et ses qualités de chanson de transition. Je prends du retard sur mon programme à l'écouter. Comme toujours aussi, le repas est ce qu'il y a de plus dur à écourter. Je m'empresse à faire la vaisselle et je descends à la salle de bain me brosser les dents. Les pistes défilent et j'entends déjà « Stereo Skin », sur laquelle je dois me contenir pour ne pas siffloter. Si je veux éviter de repeindre mon miroir avec un feu d'artifice blanchâtre, de toute façon, c'est nécessaire.
Allez, assez rigolé. La caféïne est à son paroxysme dans mes veines, mes dents propres, je suis habillé. Je me jette sur mon sac, vérifie que le minimum vital est bien à l'intérieur et claque la porte de l'appartement. L'air frais de la balade « The After » se mélange à celui de l'extérieur, qui se fait déjà sentir un peu sur le palier. Je ne suis pas particulièrement en avance, mais tout pousse ici à décélérer le pas, observer l'horizon et faire confiance au timing du tramway. Impeccablement surréaliste, alors que je me poste pour attendre, celui-ci apparaît. Me voilà bien parti pour la journée.
The Terrible Things se révèle être une excellente expérience empirique. Naturellement, cela n'aurait sûrement pas aussi bien fonctionné avec tous les albums possibles et imaginables. Roken Is Dodelijk a une force de communication, émotionnelle, unique. Il va également de soi que mon expérience a été légèrement romancée pour les besoins de la cause, puisque ma relation avec The Terrible Things est un peu plus compliquée et poussée qu'une rencontre matinale de vingt-cinq minutes, que Roken n'est pas seulement le meilleur ami du petit-déjeuner mais exerce son charme à toutes heures. Tout comme il va de soi que fumer, c'est mortel. Pensez-y !
.: Tracklist :.
01. Holy War
02. King Of This Town
03. I'm Going To Make It Today
04. The Terrible Things
05. The Letter
06. Stereo Skin
07. The After