Boogers bricolait à droite et à gauche. Quelques collaborations de ci et là (Rubin Steiner), des concerts aux quatre coins de l’hexagone, une victoire au FAIR 2010, une signature sur le fameux label At(h)ome. Un cheminement qui amène aujourd’hui Boogers à bricoler un album complet, petite merveille extraterrestre et inclassable qui déboule en rayonnages avec une fraicheur toute printanière. Un broc’n’roll de sonorités issues d’un imaginaire foisonnant, qui confère à ce As Clean As Possible une originalité bien personnelle.
As Clean As Possible est un album fracassant. Non pas que le disque engage un assaut frontal contre les conduits auditifs Français, mais la musique composée par Boogers se révèle d’une inventivité débordante. Multi-instrumentiste de talent, l’homme orchestre superpose les plans pour accoucher d’une œuvre qui conjugue les escapades sonores actuelles à la chaleur des vibrations d’antan. Marqué au fer rouge par les classiques des seventies, Boogers compose une pop aventureuse qui ne se confine à aucun moment dans l’éternelle formule guitare sèche / piano / voix. Du charme désuet de la synth-pop (le génial « Talk To Charlie », véritable tube en puissance) aux nappes de samples classieux (« Arrymere »), en passant par le canevas épuré et sensible bardé de guitares sèches et de pianos, Boogers se fend d’expérimentations qui farfouillent dans tous les recoins. Magie de l’alchimie des influences, l’ensemble se révèle diablement étonnant et efficace. Le résultat est d’autant plus impressionnant qu’il coule littéralement de source, la multitude d’univers dépeints par Boogers pour construire son As Clean Is Possible s’imbriquant les uns dans les autres avec une extrême fluidité.
Un piano sautillant dans l’angle gauche (« I Wanna Do It Now »), une intervention de guitare furieusement rock et rétro (« I Lost My Lungs ») chargée de greffer une ribambelle de gimmicks entrainants, un habillage électronique hypnotisant et pétillant saupoudré aux coins, ce premier opus fusionne les éléments variés et ne recule devant aucune fantaisie. En témoigne une passionnante intervention de cuivres jazzy (« Someday ») fantastiquement bien trouvée. Au milieu de ce triturage instrumental d’une cohérence à toute épreuve intervient le chant de l’artiste, tout aussi habile à voyager dans les registres les plus curieux. Répondant au dynamisme de tous les instants de ses toiles sonores par un timbre haut perché peu commun, Boogers pose sur bandes des lignes vocales empreintes d’une sincérité manifeste. L’enregistrement prend soin de ne pas gommer les imperfections (« I’m Sorry ») afin d’éviter la justesse clinique, et apporte parallèlement au disque une âme et une authenticité plutôt appréciables. Bien que difficile d’accès de prime abord, le timbre particulier, presque écorché, s’accorde avec brio aux dérives expérimentales rétro-électro-popisantes et transcende le tout avec un sens de la mélodie redoutablement aiguisé.
La seule véritable carence de As Clean Is Possible tient de sa faible contenance. Deux titres supplémentaires n’auraient clairement pas été de trop, et d’autant plus appréciables au vu de la qualité de composition dont fait preuve Boogers sur ce premier véritable essai discographique. Contre-argument : l’album ne propose aucun morceau en demi-teinte. Mention très bien, tirant avec insistance vers le sans-faute pur et simple. A découvrir impérativement.
.: Tracklist :.
01. Anywhere
02. I Trust You
03. I Lost My Lungs
04. Put Your Head
05. Talk To Charlie
06. Someday
07. Perfect Week
08. I Wanna Do It Now
09. I'm Sorry
10. The Devil