A la question « comment décririez-vous votre nouvel album », les membres de Still Remains répondront d’une voix unanime qu’il est en tous points supérieur à son prédécesseur Of Love And Lunacy, publié via Roadrunner Records au cours de l’année 2005. Le syndrome du jeune et fougueux groupe américain, qui montrera très certainement plus de réserve avec les années. Mais comme The Serpent est estampillé Roadrunner, un label qui sait opérer de bons choix en matière de gros son metalcore sévèrement burné et que le tout a été mixé par une pointure (Logan Madder, ex-Machine Head et ex-Soulfly), on n’avait aucune réelle raison de s’en faire, même s’il paraissait presque évident que l’originalité ne risquait guère d’être au rendez-vous.
Car ce qui est certain, c’est que Still Remains marche bien dans les rangs : Eye-liner soigneusement appliqué, mèches de vigueur et son calibré FM, les six américains ne prennent guère de risques et pourraient bien s’assurer avec The Serpent un modeste succès auprès de la population adolescente. Mais après tout, la formule a déjà fait ses preuves et d’autres (The Devil Wears Prada pour ne citer qu’eux) sont bien parvenus à livrer de très corrects albums malgré un académisme plus que prononcé. Ce sera aussi le cas de Still Remains, qui sans se placer dans le haut du panier, balance onze titres qui passent comme une lettre à la poste. Un peu trop facilement, diront ceux qui attendaient de ces six jeunes musiciens un petit sursaut supplémentaire. Mixant de bons morceaux d’emo, style particulièrement en vogue ces derniers mois, à de coriaces envolées metalcore qui ne sont pas sans rappeler des formations telles que Caliban, Still Remains se fend d’un son qui ne sombre pas dans la guimauve insipide, mais qui ne fait en parallèle pas preuve d’une violence démesurée. Les riffs de guitares bourrinent juste comme il se doit, accompagnés d’une section rythmique qui fait dans l’appuyé et l’épileptique, grand renforts de double-pédale oblige. Adrian Green démontre d’ailleurs tout son talent avec un jeu de batterie relativement riche, enchaînant les breaks avec une vélocité entraînante et matraquant son set avec insistance. On pourrait même parfois jurer qu’il est le seul à ne pas se retenir dans sa frénésie, même si celui-ci sait également faire par moments preuve d’une néanmoins courte retenue (« Anemia In Your Sheets »). A l’instar d’un Bullet For My Valentine, les petites attaques de riffs martialement matraquées foisonnent de toute part, étrangement superposées à de très présentes tirades de clavier qui apporte un petit coté électro-transe inattendu et sympathique (l'éponyme « The Serpent », « Dancing With The Enemy »). Une touche quasiment propre à Still Remains, même si Enter Shikari a maintenant prouvé que ces sonorités n’étaient pas forcément antagonistes à un canevas bien saturé.
Ces onze titres demeurent donc très mélodiques, en grande partie grâce à l’apport de T.J. Miller qui use et abuse d’un chant clair jusque à le rendre parfois horripilant. Pourtant, ce serait mentir que dire que le bougre n’est pas doté de sacrés capacités vocales. Lorsqu’il daigne dériver vers un chant hurlé bien mesuré et arraché, le frontman sait rendre les passages bien plus entraînants et surtout dynamiques (« Avalanche », meilleur morceau de l’album). Dommage que la balance n’ait pas été équilibrée dans l’autre sens, car malgré la justesse de ces prouesses, la sur-exploitation du registre clair finit inévitablement par lasser ainsi que par instaurer une certaine répétitivité. On a en effet parfois l’impression que Still Remains tourne un peu en rond, la cohérence dont faisant preuve The Serpent s’avérant tellement prononcée qu’aucun morceau ne se détachera véritablement du lot au final. Difficile dans ces conditions de s’enfiler les onze compositions d’une traite, et ce n’est sûrement pas l’insupportable ballade pour midinettes stratégiquement placée à mi-chemin (« Maria ») qui apportera cette variété tant attendue. Tout juste entraînera-t-elle un arrêt prématuré de la course de The Serpent dans le lecteur CD.
The Serpent reste un disque facile d’écoute et évidemment en rien désagréable pour peu que l’on daigne éviter cette calamiteuse et insupportable cinquième plage. A l’auditeur de décider s’il percevra cette galette autrement qu’un amoncellement de compositions vite ingérée vite digérée.
.: Tracklist :.
01. The Serpent
02. The Wax Walls Of An Empty Room
03. Stay Captive
04. Anemia In Your Sheets
05. Maria
06. Dropped From The Cherry Tree
07. Dancing With The Enemy
08. The River Song
09. Sleepless Nights Alone
10. An Undesired Reunion
11. Avalanche