En 2020, le premier album éponyme de Slomosa avait frappé fort, propulsant ce groupe norvégien sur la scène européenne du stoner rock, un genre pourtant habituellement associé aux vastes étendues désertiques du sud-ouest des États-Unis. Quatre ans plus tard, Slomosa revient avec Tundra Rock, un deuxième album, que j’attendais impatiemment : j’espérais une belle confirmation pour ce groupe qui marche si bien sur album comme sur scène. Et, comme le titre l’indique, ils continuent de brouiller les frontières géographiques et sonores en imposant leur style percutant : un desert rock venu du froid.
Originaire de Bergen, ville souvent noyée sous la pluie et les tremolo pickings des groupes de black metal locaux, Slomosa canalise paradoxalement l’essence même des paysages arides à travers des riffs simples et massifs et des sonorités crasseuses. Si leur premier LP les avait fait émerger, Tundra Rock les positionne bien en tant que figure incontournable du genre. L’album a été enregistré entre le studio Polyfon et le studio Marinius, avec Eirik Marinius Sandvik à la production, et la maîtrise impeccable de Jørgen Træen. Ce n’est pas seulement une progression naturelle pour le groupe, c’est un vrai bond en avant en termes de maturité sonore et de cohésion musicale.
Dès l’ouverture instrumentale avec Afghansk Rev, on retrouve la patte caractéristique de Slomosa : des guitares lourdes mais tout de même très mélodiques et efficaces, une basse grondante, et une batterie imposante qui martèle un paysage sonore évocateur. Cette introduction prépare le terrain pour les morceaux phares tels que Rice, Cabin Fever et le tout nouveau single Red Thundra. Chaque titre nous plonge dans une atmosphère à la fois brute et aérienne, qui lorgne sévèrement sur le rock west-coast, des 90s à nos jours. On sent autant l’influence des grands anciens du desert-rock (Kyuss en tête), du stoner-doom (on pense à Elder, par exemple, avec qui ils ont tourné d’ailleurs), que celle du grunge. De ce dernier univers musical, Slomosa tire un sens de la simplicité et de la mélodie, presque pop, trop rares dans le monde du metal.
Slomosa a en effet développé l’art, trop rare, de manier le riff simple et accrocheur pour servir une bonne chanson, tout simplement. On le ressent sur des morceaux comme Good Mourning, qui alterne entre des phases de tension et des relâchements puissants, typiques du rock 90s et du stoner. Et que dire de la conclusion magistrale de l’album, Dune ? Ce morceau clôture l’œuvre avec une force tranquille, laissant l’auditeur sur une note à la fois épique et introspective.
Si Slomosa s’autoproclame « Tundra Rock », c’est parce que leur musique incarne cette dualité. Elle est à la fois froide et chaleureuse, rugueuse mais profondément accessible. On sent que le groupe a puisé dans ses racines nordiques pour élaborer des sonorités authentiques, tout en restant fidèle à l’héritage des grands noms du desert rock. Ce n’est pas simplement une reprise de ce qui a été fait, c’est une réinvention, une adaptation de l’esprit de ce genre à leur environnement unique.
L’artwork signé Elsa Enestig complète cet univers singulier, avec une pochette qui évoque autant la rudesse de la nature, la beauté brute de l’inconnu que le fait que BORDEL ce fichu glacier est en train de fondre !
En résumé, Tundra Rock est la preuve que Slomosa n’est pas une étoile filante dans le ciel du stoner rock. Ce deuxième opus consolide leur place et montre qu’ils ont encore beaucoup à dire. Alors que les paysages désertiques inspirent souvent ce genre musical, Slomosa prouve que la toundra peut aussi être une source de puissance et d’inspiration créatrice.
Tracklist :
1. Afghansk Rev
2. Rice
3. Cabin Fever
4. Red Thundra
5. Good Mourning
6. Battling Guns
7. Monomann
8. MJ
9. Dune
