Avec le label Lifeforce Records, on sait toujours plus ou moins à quoi s’attendre. Spécialiste du hardcore et de ses dérivés, la structure allemande ne déroge cependant que rarement à ses deux mots d’ordre : virulence et qualité. Auteurs d’un premier album éponyme passé relativement inaperçu, les cinq américains de Seneca franchissent une nouvelle étape avec Reflections et imposent un disque plus carré et professionnel que leurs expérimentations passées.
Furieusement déjanté, virant à de rares occasions vers les mélodies, le premier opus de Seneca se profilait comme un pur défouloir hardcore, parfois proche dans l’idée d’un Dillinger Escape Plan des premières heures. Dans l’ensemble nettement moins allumé que son prédécesseur, Reflections pourra décevoir par un plus grand conventionnalisme, heureusement rapidement oublié face à la débauche d’énergie dont témoignent ces onze nouvelles compositions. Gonflés aux amphétamines par une production rouleau-compresseur assurée par Jamie King (Between The Buried And Me), les morceaux se montrent plus variés mais conservent néanmoins une certaine dimension hardcore chaotique. Bien que moins prégnante que par le passé, cette propension à laisser virevolter les guitares dans les aigües tout en enquillant des riffs d’une puissance écrasante (« Birds », « Black Gold », « The 29th Day ») permet à Seneca de témoignenr d'une certaine originalité, d’autant plus que la formation ne sombre pas dans les schémas prévisibles du hardcore. Le groupe bâti en effet ses structures hors des constructions traditionnelles visant à démarquer clairement les couplets des refrains, ce qui s’avère relativement rare pour un groupe usant du chant clair de façon bien marquée. Versatile et inattendu, Seneca n’est pas sans évoquer Misery Signals dans son écriture, une comparaison d’autant plus évidente que les cinq musiciens ont accordés une plus grande importance à leurs mélodies.
Si Seneca présente des préférences incontestables pour les tempos épileptiques accompagnés de riffs en cascade, le quintet a également apporté un plus grand soin à sa facette moins brutale, qui se profilait en véritable point faible sur l’album éponyme. Là ou les travaux précédents du groupe péchaient par un chant clair approximatif et étouffé, Reflections s’adjoint des lignes vocales bien plus soignées. Corey Spencer témoigne d’une plus grande aisance dans le chant clair, et bien que ce dernier demeure perfectible le travail apporté sur ces onze morceaux reste satisfaisant (l’excellent « Black Gold », « Your Heart In My Hands »). Le leader n’hésite donc plus à intervenir dans le registre, usant d’une plus grande dualité vocale sans pour autant en abuser. Les incursions mélodiques ne se voient pas uniquement rattachées aux refrains, et Seneca privilégie avant tout les déferlantes de décibels habillées de hurlements rauques (« Carousels »). Utilisées à bon escient, les mélodies servent donc de renfort de luxe à un ensemble jubilatoire et bouillonant d’électricité.
Bien que Reflections ne fasse pas preuve d’une originalité débordante, le disque s’avère plutôt bon, et de plus emballé par un son massif qui sied à merveille aux escapades musicales du quintet. Livré avec le premier album re-masterisé en bonus, cette double-ration de Seneca mérite amplement que l’on y pose une oreille attentive.
.: Tracklist :.
01. Optical
02. Palehorse
03. Black Gold
04. Carousels
05. Birds
06. Illusions
07. The 29th Day
08. Creator
09. Your Heart In My Hands
10. Names And Faces
11. Reflections