Le death mélodique a encore de beaux jours devant lui, et ce n’est sûrement pas les américains de Daylight Dies qui viendront contredire pareille affirmation, tant ces derniers représentent aujourd’hui ce qui peut se faire de mieux dans le milieu. Avec deux albums impeccables et merveilleusement équilibrés, le quintet a su se tailler une part de choix dans le paysage saturé du « mélodieusement virulent », décrochant au passage un contrat avec l’audacieux label Candlelight Records. Restait à savoir si l’envie d’évoluer n’amènerait pas les musiciens vers des paysages plus éthérés, à l’instar de la mutation opérée avec les années par Katatonia, ce à quoi Lost To The Living répond encore par la négative.
Ce troisième opus s’inscrit en effet dans la parfaite continuité de son prédécesseur, Dismantling Devotion, salué par la critique lors de sa sortie. Ce qui n’amène pourtant pas Daylight Dies a sombrer dans la redite, ces neuf nouvelles compositions présentant des qualités similaires aux précédentes expérimentations des Américains. Le groupe conserve en effet toute son habilité à alterner les éléments, le tout présentant une nouvelle fois un fort potentiel émotionnel et torturé, sans que le quintet n’use de ressorts éculés et téléphonés. Car le créneau dominant de Daylight Dies reste avant tout les ambiances plombées baignées d’une sombre électricité, les guitaristes Barre Gambling et Charley Shackelford peignant un monde aussi terrifiant qu’envoûtant (« A Portrait In White », bien moins lumineux que son titre pourrait laisser penser, « The Morning Light »). Couplés à une batterie qui instaure une paysage obscure à l’aide d’une frappe lourde et toute en retenue, les deux musiciens allient la puissance d’un riffing efficace à des envolées mélodiques en lead absolument sublimes et omniprésentes (« A Subtle Violence », « At A Loss » et ses très longues échappées instrumentales). La combinaison se montre parfaitement maîtrisée et astucieusement développée, la longueur des étendues sonores, majoritairement supérieures à cinq minutes, laissant pleinement le temps à Daylight Dies de développer son univers aux travers de schémas alambiqués et riches en revirements.
Car au delà de l’alliance de ses deux guitares, les Américains laissent libre court à toutes leurs envies en posant sur bandes de grands espaces éthérées et dénués de toute intervention vocale, l’occasion notamment de laisser intervenir quelques tirades acoustiques remarquablement intégrées (« Descending », « Woke Up Lost »). Suffisamment rares pour générer un certain effet de surprise, cette composante remplit parfaitement son rôle en aérant l’ambiance parfois étouffante de Lost To The Living, tout en respectant l’aspect mélancolique et triste amené par chaque morceau. Malgré les très nombreux changements rythmiques et d’ambiances opérés au sein de chaque titre, Daylight Dies parvient à conserver toute la cohérence nécessaire, le groupe n’utilisant de plus pas le chant comme un véritable fil rouge. Ce dernier ne se montre en effet pas envahissant, et laisse même souvent l’espace libre au développement des instrumentations. Nathan Ellis se fend néanmoins d’interventions graves et impeccables, ses incantations ténébreuses répondant à merveille aux tissus dressés par Daylight Dies. Plus surprenant, le quintet à laissé une place grandissante au chant clair du bassiste Egan O’Rourke, qui viendra habiller deux compositions nappés dans des brumes envoûtantes d’une justesse et d’une sensibilité à fleur de peau (« Woke Up Lost » ainsi que « Last Alone »). Daylight Dies s’éloigne pour le coup de son style de prédilection pour venir piétiner les plates bandes de Katatonia, un exercice de style pour lequel le groupe excelle. Deux titres magnifiques de maîtrise et d’ambition.
Si Lost To The Living restera purement ancré dans les fondations imposées par le passé, Daylight Dies signe néanmoins un album d’une très grande qualité, frôlant même le sublime de par ses deux voyages dans les contrées cotonneuses d’un rock mélancolique. La facilité avec laquelle les musiciens maîtrisent les ambiances à une nouvelle fois de quoi déconcerter. Nul doute que la suite fera date, au même titre que ce troisième opus.
.: Tracklist :.
01. Cathedral
02. A Portrait In White
03. A Subtle Violence
04. And A Slow Surrender
05. At A Loss
06. Woke Up Lost
07. Descending
08. Last Alone
09. The Morning Light