Note : les versions promotionnelles fournies par Relapse Records étant découpées en quatre-vingt dix neuf pistes et le track-listing ne donnant pas d’indications concernant les plages de début des morceaux, il demeure impossible de citer une composition au sein de cette chronique. Celle-ci est donc abordée comme « un tout ». Il reste cependant préférable de s’engager dans l’écoute de Lazarus Bird sous cette forme, et si possible d’une unique traite.
Sous quelle bannière classer Burst ? Le choix s’avère des plus cornéliens. Burst est un objet musical non identifié, probable raison à une popularité qui ne semble pas véritablement décidée à se greffer à l’histoire du groupe. Formé en 1993, la formation signera quelques sorties confidentielles supportées par un obscur label indépendant. Déniché par les fins nez de Relapse Records, Burst s’accorde enfin en 2003 un début de reconnaissance bien méritée avec Prey On Life, s’engageant par la suite en tant que warm-up de talents confirmés (Opeth, Mastodon) le temps de quelques dates. Troisième album pour Relapse, Lazarus Bird vient une nouvelle fois témoigner de tout le talent de Burst.
Ce nouvel opus offrira-t-il à Burst une ouverture au succès ? Si la question reste aujourd’hui en suspens d’un point de vue commercial, Lazarus Bird renferme néanmoins un potentiel artistique non négligeable. Un contenu certes plutôt concis (huit compositions uniquement), mais diablement bien écrit et surtout totalement personnel. L’œuvre de Burst fait preuve d’une grande originalité, les musiciens se jouant des styles afin de ne jamais s’enfermer dans les restrictions de ces derniers. Liberté d’exécution et virtuosité instrumentale se conjuguent donc à merveille, le groupe naviguant perpétuellement entre hardcore, rock, postcore, voire à l’occasion ambiant racé. Les atmosphères sont à ce titre particulièrement travaillées et riches en émotions, Burst prenant le temps d’allonger ses structures afin de ne pas confiner cette composante dans une dimension anecdotique et inutile. Les guitares sont amenées à évoluer vers des horizons clairs et éthérées à de très nombreuses reprises, instaurant un aspect quasi-hypnotique via un propension à poser sur bandes des mélodies aériennes et bardées de résonances. La puissance salvatrice n’est jamais très loin derrière, mais néanmoins souvent retenue de longues minutes, sa présence s’avérant même minimale contrairement à ce que l’on pourrait être en mesure d’attendra aux premières écoutes. Le riff ne se dresse donc qu’à de rares moments en pur élément de base (bien que l’ouverture « I Hold Vertigo » en soit profondément imprégné), Burst optant pour une construction décomplexée et majoritairement virevoltante, un canevas sans véritables repères présentant une grande richesse de variations et sur lequel l’électricité s’impose de façon inattendue et percutante. L’effet n’en est que plus efficace, tant il demeure difficile d’en prévoire l’intervention.
Linus Jagerskog se fait presque au contraire émissaire de la violence et de la hargne, le frontman déroulant des interventions habitées et arrachées mais néanmoins couplées aux instrumentations avec une certaine parcimonie. Le chant laisse en effet respirer la musique sur de longues étendues, l’illustrant sur quelques recoins de lignes claires parfaitement maîtrisées mais toutes aussi candidates à la discrétion. Chez Burst, la sensibilité vient d’abord à passer par la beauté des guitares, l’intéressé permettant cependant à la puissance de décupler en intensité libératrice. Car si l’alliance d’échappées mélodiques en apesanteur aux incartades saturées a déjà été expérimenté par le passé à de très nombreuses reprises par des formations incontournables (Isis, Cult Of Luna), Burst s’en détache de par un usage quasiment inverse, le mélodique tout en clarté prenant souvent le dessus. Les musiciens se reposent même parfois sur la section rythmique afin d’assurer la cohérence de leurs toiles, la basse marquant sa présence de lignes groovy pleinement détachées du travail des guitaristes. La batterie de Patrick Hultin se montre également très inventive et schizophrénique, le musicien redoublant de technique et de cassures rythmiques, permettant a la paire de guitaristes de mettre en forme les idées les plus folles. Il n’est en effet pas rare d’entendre les six-cordes s’éloigner dans les tonalités les plus psychés, ces dernières donnant forme quelques mesures plus loin à de purs solos échappés des eighties. On dénotera même quelques intrusions à l’origine furieusement jazzy, précédant de peu une totale improvisation de free-jazz métissé. Bluffant.
Lazarus Bird est-il un album incontournable ? Sans aucun doute. Mais ce dernier n’a rien d’une opération commerciale tant l’accès aux dérives sonores du groupe nécessite la plus grande attention. Le chemin pourra être long et déroutant, pourtant il amène invariablement à une forme d’osmose musicale. Le terme d’œuvre prend ici tout son sens.
.: Tracklist :.
01. I Hold Vertigo
02. I Exterminate The I
03. We Are Dust
04. Momentum
05. Cripple God
06. Nineteenhundred
07. (We Watched) The Silver Rain
08. City Cloaked