Si le rock américain ou européen fonctionne particulièrement bien au pays du soleil levant, on peut difficilement en dire de même pour la musique Japonaise chez nous. Néanmoins, et grâce à des labels comme Free Will ou Musicast, ces sonorités prennent timidement place dans les rayons et les tympans français. Fondé à l'aube du nouveau millénaire, Kagerou est assurément l'un des leaders du mouvement Visual Keï, notamment grâce à la sortie de ce second opus acclamé par le public et la critique.
De premier abord, Rakushu s'avère plus que déroutant. Déstabilisant par l'utilisation du japonais dans les paroles, mais également par l'approche du son opérée par le groupe. Si Kagerou se place résolument dans un univers metal par l'utilisation de riffs acérés et massifs montés sur une base rythmique puissante construite autour d'une basse vrombissante ainsi que d'une batterie épileptique (le fantastique et détonant « XII Dizzy », « Holy Needle »), les quatre musiciens intègrent à leurs morceaux des influences bien propres à leurs origines et au mouvement auquel ils se voient affiliés. Les japonais laissent en effet leur musique respirer par le biais de passages nettement moins plombés, proposant sur certains couplets un accompagnement de basse marqué et groovy sur lequel viennent s'ajouter quelques discrètes notes de guitares qui viendront précéder la puissance dévastatrice du refrain (« Masatsu Shinko », ponctué d'un court break acoustique, « Hikari no Kage »), une courte introduction pianistique (« Shibire Kokoro), s'éloignant même radicalement de la saturation pour s'aventurer vers des terrains nettement plus rock'n'roll, funky (« Kasa ») ou même pop (la ballade « Betsuri Ro », qui clôture Rakushu dans un déluge d'émotions ponctué d'un superbe solo de Yuana).
Faisant preuve d'une homogénéité rare et d'un équilibre entre chaque intervenant calibré avec génie, les instrumentations sonnent avec une impressionnante justesse, amenant une texture particulièrement propice à l'expression du talent de Daisuke, charismatique frontman de la formation nippone. Doté d'un registre vocal extrêmement large celui-ci assure aussi bien et avec la même aisance un chant posé et mélodique (« Betsuri Ro », le rebondissant « Rasen Kubi ») que des hurlements graves ou suraiguës, alternant ces différents registres dans la majeure partie des compositions. L'utilisation de la langue natale du groupe amène également une originalité par ailleurs déjà bien présente dans les ossatures des treize morceaux composant Rakushu.
Amenant un sérieux renouveau dans la scène metal, Kagerou pourrait bien venir écraser les formations qui se reposent sur leurs lauriers, si le public daigne lui laisser sa chance. Une perle à découvrir absolument.
.: Tracklist :.
01. Holy Needle
02. XII dizzy
03. Rasen Kubi
04. Koukotsu Jigoku
05. Masatsu Shinko
06. Shibire Kokoro
07. Kasa
08. Nikushimi no Hitori Shibai
09. 3.2.1
10. Koi Uta
11. Hikari no Kage
12. Jubaku Oto
13. Betsuri Ro