C’est en provenance des tréfonds marins que nous vient l’évènement métal hexagonal de la rentrée: en effet, Poseidon, 3ème opus de Dagoba, est un album concept autour du thème des océans, et le roi des mers lui-même n’aurait pas renié ces dix déferlantes. Attention, avis de tempête sur le Vieux Port, Dagoba a trouvé un successeur à Face The Colossus et Poseidon risque bien de faire sa loi face au colosse…
Le métal français extrême d’aujourd’hui réussit là où les représentants hexagonaux du néo-métal se sont cassé les dents, c’est-à-dire aux frontières de notre beau pays. Les Gojira, Dagoba ou autres Hacride s’exportent bien, avec ou grâce à une humilité exemplaire, en contradiction avec les velléités d’export trop ambitieuses de Mass Hysteria ou Pleymo, par exemple. Le métal français ne fait plus de complexe par rapport à ses voisins scandinaves ou d’outre-atlantique, et cela se ressent dans la qualité des productions, du son et des prestations scéniques. Ce Poseidon s’inscrit dans la droite ligne de ce constat, nous offrant un parfait exemple d’un album réussi de bout en bout et qui, avec des premiers chiffres de vente prometteurs, pourrait bien être LA bonne surprise de cette rentrée. Dagoba, un peu à l’image de Slipknot dans les années 90 qui fut un pavé dans la mare en pleine mouvance Néo-Métal gentillette, pratique un Metalcore plutôt violent mais tout à fait prêt à atteindre un public plus large grâce à quelques touches bien senties d’Indus, de Rock et de Progressif. Les français s’illustrent surtout par un soupçon d’originalité dans un style très cloisonné et très prolifique en sorties à défaut d’être novateur, comme l’illustrent les derniers opus d’As I Lay Dying ou 36 Crazyfists.
L’entrée en matière est belle et douce (43° 17’N/5°22’E, soit les latitudes et longitudes de Marseille), ce qui renforce l’arrivée du monumental riff Indus à la Rammstein du premier titre « Dead Lion Reef ». S’ensuivent des perles Métalcore, un single (« Black Smokers ») où l’électronique donne le ton sur le couplet et au refrain ultra-accrocheur rappelant une nouvelle fois les tentations mélodiques des 9 de Des Moines, un incroyable morceau instrumental débordant d’efficacité et de groove ("The Horn Cape") où la double pédale se charge des mélodies… Dagoba envoie du très lourd, le tout agrémenté d’une batterie hardcore version mitraillette qui arrose tout sur son passage, ainsi que d’un chant, hardcore lui aussi, plus brut que sur les opus précédents mais aussi plus précis et incroyablement intense, et qui tente quelques incursions mélodiques sans verser dans la quasi-niaiserie de certains des refrains d’As I Lay Dying et consors. L’intro et les couplets de « Columnae » laissent pantois par leur groove et leur efficacité, tout comme cet apport conséquent des synthés, encore une fois subtil mais essentiel, donnant une légère dimension progressive plus qu’agréable. Mention spéciale au son de ce Poseidon, tout simplement énorme mais bien épuré, le groupe voulant éviter la production « surfaite » de Face The Colossus. Pour retrouver la brutalité de leurs débuts, les Dagoba se sont rendus là où ils avaient enregistré leur premier opus, au Philia Studio de Hanley-On-Thames (Angleterre), et à ce niveau là, c’est aussi totalement réussi.
On ressort vraiment séduit par la démarche des marseillais sur ce Poseidon. Brutal, profond, soigné, les Dagoba ont évolué, intégrant tout ce qu’ils ont pu faire de bien par le passé, et passant le surplus par-dessus bord, dans un album dit « de la maturité ». Certainement taillé aussi bien pour la scène que pour l’écoute, le groupe défendra son œuvre aux relents marins sur les scènes européennes à travers une jolie tournée qui les verra notamment fouler les planches de la Maroquinerie en novembre. Bon vent à eux, donc.
.: Tracklist :.
1. 43° 17’N / 5° 22’E
2. Dead Lion Reef
3. Columnae
4. The Devil’s Triangle
5. Degree Zero
6. The Horn Cape
7. Black Smokers (752° Fahrenheit)
8. Ha Long
9. Shen-lung
10. I Sea Red
11. There’s Blood Offshore
12. Waves of Doom