Trio français formé en 1995, ACWL aligne les concerts et les démos jusqu’à leur signature sur le label M10, six automnes plus tard, pour la sortie de leur premier album éponyme. Les critiques sont unanimes et l’accueil du public chaleureux : tous s’accordent à placer sur ACWL de bons espoirs pour l’avenir du rock français. Il faut avouer que ce disque mélangeant habillement post-grunge, rock indie et simulacres de la scène gothique des 90’s (Lush et Cranes en tête) a de quoi enthousiasmer, grâce aussi à la voix de Céline qui, comme les compositions, voyage entre douceur extrême et envolées lyriques sous des guitares agressives. La révélation advient définitivement en 2005 avec la sortie du deuxième effort, Une vie plus tard, qui tient ses promesses malgré un son parfois étouffé et une évolution musicale amenant la formation à s’intéresser de plus près à la new wave.
Le chemin du ciel, dans les bacs depuis le 27 avril et distribué par XIII Bis Records, a de fortes chances de chambouler la scène française qui, disons-le, a souvent tendance à tourner en rond. ACWL se fiche catégoriquement des étiquettes, et ça tombe bien puisqu’il s’avère quasiment impossible de lui en coller une sur le front. Loin des clichés risibles pseudo gothiques affublant une bonne quantité de groupes (par ailleurs rapidement oubliés), le trio reprend la recette des deux opus précédents en proposant une qualité du son digne de l’ensemble, plus brut qu’à l’accoutumée. Evolution qui se prête bien à la tonalité globale, puisque les compos varient principalement dans des crescendos plutôt habiles (« Athéna », « In humanité », reprenant les mêmes codes qu’un Muse en pleine forme). Alternant entre un post-grunge embrumé (l’instrumental « Renaissance », accessoirement l’une des merveilles de l’album), une pop aérée (« Tuer mon idole »), et un rock lyrique teinté d’ambiances celtiques (« E-fée »), ACWL flirte même avec le métal sur « L’invisible », dans laquelle la voix de Jean y est sûrement pour quelque chose.
Côté textes, la mort paraphe intrinsèquement toutes les volutes de cet album qui, alors que son titre appelle déjà à une échappatoire céleste, débute sur « Promesse », premier single orné de désenchantement et de solitude sur le dernier souffle d’un être cher, et se conclut sur « Cueille-moi », d’une douceur comparable à Alison Shaw des Cranes et dont le fond renvoie quelque peu à la fin tragique d’Eurydice et Orphée. Sauf que l’univers d’ACWL oscille plus près de la mélancolie et des atmosphères brumeuses que d’un gouffre lacrymal et désespéré à proprement dit : rien n’est larmoyant ni suicidaire. Entre romantisme exacerbé, obscur et littéraire, vœux d’introspections floues, amours ambiguës, incompatibilité des sentiments et destruction, Le chemin du ciel se révèle également par quelques citations éparpillées comme des clins d’œil (le « Silence ! L’ennemi guette vos confidences » dans « In humanité », à la base slogan d’une affiche de Paul Colin en 1940).
Les quatorze morceaux de ce nouvel album restent cohérents en se distinguant pourtant les uns des autres, ce qui n’est pas toujours acquis d’avance. Il serait alors difficile de trouver un quelconque défaut à ce disque, même si certains pourraient éventuellement décrocher sur ces tempêtes éplorées ou les quelques pistes instrumentales, instaurant une atmosphère aussi onirique que désenchantée.
« Bienvenue au monde ou ce qu’il en reste » chante Céline dans « In humanité ». Il faut croire que le chaos et le parfum de désolation se prêtent parfois à l’extase la plus insoupçonnable. A découvrir absolument.
.: Tracklist :.
01. Promesse
02. E-fée
03. Athéna
04. Morphée
05. Renaissance
06. Entrer dans la danse
07. L'invisible
08. Alarme
09. Tuer mon idole
10. In humanité
11. Chaos
12. Elieanor
13. Sanctus
14. Cueille-moi