Déjà ? On peut dire que le quatuor Chicagoan Fall Out Boy ne reste pas longtemps les mains dans les poches. Après avoir sorti leur 4ème album Infinity On High en février 2007, après l'avoir défendu ardemment, y compris loin de chez eux (certaines dates ont été jouées en Russie, en Ouganda ou en Indonésie), après avoir écumé les plateaux télé et sorti une reprise de Michael Jackson, on aurait pu diagnostiquer un épuisement dû à une hyperactivité à l'intégralité des membres. Il n'en est rien, Pete Wentz et ses acolytes dégainenent donc déjà un nouvel opus, nommé Folie à Deux, une façon de (se) prouver qu'il sont bien les princes du pop-punk. Pari réussi ?
La folie à deux est une psychopathologie qui se manifeste par la transmission de symptômes psychotiques d'une personne à une autre. Cela nous fait une belle jambe, et pourrait presque faire passer Fall Out Boy pour des gars sérieux, et leur album comme celui de la maturité avec un tel choix de titre. Rassurez-vous, il n'en est rien. Après avoir ouvert la pochette (à l'artwork signé Luke Chueh, on conseille) et appuyé sur play, on retrouve les ingrédients classiques de la formule, qui a déjà fait mouche lors de leurs précédents albums. « Disloyal Order of Water Buffaloes » (quels boute-en-trains, ceux-la) commence avec un orgue mielleux sur lequel Patrick Stump vient poser sa voix caractéristique. On remarque déjà un côté un peu plus grandiloquent dans leur musique, qui, couplé avec la production léchée et un brin clinique de l'ensemble, ainsi que les arrangements très pop, peut faire imaginer une variétisation de la musique du quatuor. Neil Avron et Pharell auraient-ils volé l'âme du combo, qui n'en avait déjà plus beaucoup ? « I Don't Care », premier single, se charge de faire comprendre que la machine à tubes est en marche, et toujours bien huilée. Le titre met tout le monde d'accord en 3'34''. « America's suitehearts » est sexy, mélodique, le refrain est imparable, Fall Out Boy maitrise la pop, et le montre.
Quelque chose à tendance à nous gêner depuis le début, quand même. En effet, on peut se demander si le terme pop-punk est encore vraiment adapté à une telle musique… La question pouvait déjà être posée à l'époque d'Infinity On High, elle est on ne peut plus pertinente aujourd'hui. C'est bien fait, c'est parfois tubesque et addictif, mais quelque part, on a affaire ici à un mélange entre pop, mainstream rock, punk-rock et variété, ce qui ne rebute pas forcément dans un premier temps, mais tend à agaçer passé les quelques écoutes. « Headfirst Slide… » et son vocoder semblent nous dire « oui, on sait, et on assume », « Tiffany Blews » (avec Lil Wayne en guest star de luxe) prouve d'ailleurs que Fall Out Boy ne n'impose plus de carcans ni de barrières. Convaincant ? Pas vraiment. Le groupe pousse le vice jusqu'à inviter Elvis Costello sur un morceau (« What a Catch, Donnie »), pour un résultat qui frise le gnangnan, malgré la qualité de jeu et de production. Quelques morceaux plus classiques parsèment le disque, « The (shipped) Gold Standard » nous fait plaisir par son côté moins chargé, « (Coffee's for Closers) » aurait été un moment clé du disque sans cette surenchère de cordes, son refrain étant diablement excellent.
En bref, et après réflexion, on se dit que cet album signe à la fois un déclin et une renaissance. Fall Out Boy n'a jamais eu la prétention d'être underground, et a tout fait pour pencher de l'autre côté de la balance (télé, journaux people…), on le savait d'avance, mais, même en prenant cela pour acquis, cet album peine à convaincre. Malgré une science du tube qu'on ne remet plus en cause, malgré une qualité de jeu indiscutable, Folie à Deux reste un disque hétérogène, tant au niveau du son que de la qualité, et les papillonages du combo, qu'on pourrait penser bienvenus, n'ont eu pour effet que de lisser leur musique, trop pour qu'on puisse lui accorder un réel crédit. Au final, les Fall Out Boy risquent de perdre des fans (et d'en gagner également), on peut imaginer qu'ils n'en ont cure, ils savent pertinemment que leur album se vendra bien, et qu'ils ont bien fait leur job. Mais la musique est plus qu'un job.
.: Tracklist :.
1. Disloyal Order of Water Buffaloes
2. I Don’t Care
3. She's My Winona
4. America's Suitehearts
5. Headfirst Slide into Cooperstown on a Bad Bet
6. The (Shipped) Gold Standard
7. (Coffee's for Closers)
8. What a Catch, Donnie (feat. Elvis Costello)
9. 27
10. Tiffany Blews (feat. Lil Wayne)
11. w.a.m.s.
12. 20 Dollar Nose Bleed (feat. Brendon Urie)
13. West Coast Smoker (feat. Debbie Harry)