On ne pourra que difficilement retirer à Mudvayne une inébranlable et constante envie d’avancer. Depuis les débuts prometteurs de L.D. 50, premier opus distribué au niveau mondial, le groupe explore des horizons musicaux nouveaux et inattendus à chaque nouvelle livraison. Du metal alambiqué et schizophrénique des premières heures, le quatuor s’était orienté vers un dépouillement progressif des structures, accouchant avec Lost & Found en 2005 de son disque le plus accessible. Ce qui n’empêchait en rien les musiciens de conférer à leur musique une indiscutable qualité, bien que les américains délaissent les plans techniques au service d’un aspect « chanson » plus commun. The New Game laissait planer l’espoir que Mudvayne s’oriente une nouvelle fois vers des terrains inédits. Essai manqué.
Plus rock. Les américains annonçaient clairement leurs inspirations du moment, désormais ancrées de manière bien plus marquées dans le conventionnalisme. Là où Lost & Found laissait encore à l’occasion transpirer quelques réminiscences du passé, The New Game s’habille définitivement d’une robe mainstream, gommant désormais totalement l’étiquette hybride dont pouvait se vanter Mudvayne sur ses deux premiers et remarquables opus. Le souhait de revenir dans le droit chemin d’un rock’n’roll à l’américaine standardisé pour les ondes radiophoniques n’était pourtant pas inévitablement synonyme d’échec artistique, en témoignent les morceaux les plus calibrés grand public de Lost & Found ainsi que l’inédit intégré au faux best-of By The People, For The People (le très bon « Dull Boy », également présent au track-listing du disque). Mudvayne ne parvient cependant qu’à de rares occasions à poser sur bandes des échappées véritablement vibrantes, les plans de guitares demeurant désespérément monotones et académiques (les très mauvais « Have It Your Way » et « A Cinderella Story », le très mauvais single « Do What You Do »). Désormais peu enclin à s’épancher dans les débauches épileptiques de riffs en cascade, Greg Tribett construit les ossatures des morceaux sur des rythmiques mid-tempos d’une extrême platitude, les quelques tentatives d’incursions dans des sphères plus virulentes manquant par ailleurs cruellement d’impact (« We The People »). L’escapade vers des horizons rock redneck avec Hellyeah semble avoir marquée la composition de The New Game, Tribett tentant en compensation de greffer aux tissus sonores affreusement simplistes quelques tentatives de solos relativement anecdotiques et peu adaptées aux morceaux (« The New Game »).
Limitée par des étendues instrumentales aseptisées, la section rythmique ne parvient à aucun moment à greffer à la musique de Mudvayne l’incroyable technicité dont les deux musiciens s’étaient pourtant fait représentants par le passé. Le bassiste Ryan Martinie, auparavant élément moteur du quatuor de par son ingéniosité, fait preuve d’un total manque d’inspiration, probablement castré dans ses envies par des tissus inadaptés (« Dull Boy » est l’unique titre sur lequel le musicien imprime une présence véritablement marquée). Un sentiment renforcé par une production lisse au possible, incapable de greffer aux passades plus riches en saturation la puissance nécessaire. Maigre compensation, Chad Gray semble s’accommoder de la banalité des instrumentaux et se fend d’un chant impeccable, le frontman ayant développé une aisance et une maîtrise totale d’un registre clair particulièrement soigné et efficace. Sa capacité à jouer sur la corde sensible sauve d’ailleurs les incartades les plus éthérées de The New Game, Mudvayne signant étrangement avec un diptyque de semi-ballades les points culminant de son quatrième album (« Never Enough » et « Scarlett Letters »). Deux superbes morceaux qui associés à quelques rares compositions convenables (dont le titre d’ouverture « Fish Out Of Water ») ne parviennent que difficilement à sauver The New Game du naufrage complet.
Contrairement aux essais passés, The New Game n’arrive jamais à développer un univers original et personnel, à l’instar d’un Lost & Found qui présentait déjà quelques carences à ce niveau. Un quatrième opus qui sonne clairement comme l’album le plus faible de la discographie de Mudvayne, déception d’autant plus regrettable lorsque l’on connaît le potentiel de chaque musicien. Copie à revoir.
.: Tracklist :.
01. Fish out Of Water
02. Do What You Do
03. New Game
04. Have It Your Way
05. Cinderella Story
06. Hate In Me
07. Scarlet Letters
08. Dull Boy
09. Same Ol'
10. Never Enough
11. We The People