Alors que les Gun’n’Roses frappent aux portes du Paradis, un jeune groupe s’apprête à embraser les consciences d’une génération. Rage Against The Machine est une bombe qui explose à la figure d’un monde tout juste sorti de la folie consumériste des années 1980. Porté par un discours militantiste sans compromis, le quatuor intervient dans un contexte brûlant. Les émeutes raciales du printemps 1992 à Los Angeles (ville du groupe) sont en effet passées par là et ont cristallisé d’un coup les injustices omniprésentes dans la société américaine. Le premier album de Rage Against The Machine sort à l’automne de cette même année, une allumette incandescente est jetée sur une scène rock en mal d’idéaux…
Rage Against The Machine marque un tournant dans le paysage musical d’alors, la fusion reste en effet un genre réservé à certaines scènes locales américaines, Fishbone et les Red Hot Chili Pepper en étant les principaux ambassadeurs. Rap, hard rock, funk, punk, hardcore, la musique de RATM prend ses racines dans des territoires qui ne s’étaient jamais rencontrés et surtout réunis jusqu’alors (« Freedom »). Zack de la Rocha scande ses paroles dans un phrasé rappé hargneux et charismatique, le tout est soutenu par les prouesses de Tom Morello qui sort des sons que l’on n’imaginait pas pouvoir provenir d’une guitare (« Know Your Enemy »). Un groove démentiel se dégage d’une basse lourde qui vrombit ses incantations funk, et la batterie martèle des rythmes taillés dans la roche dure des quartiers pauvres. Inventifs et techniquement irréprochables, les Californiens foutent une claque musicale telle qu’ils prennent immédiatement une envergure internationale et une place de premier choix au sein de la scène rock. Les riffs imparables de « Killing In The Name » et de « Wake Up » envahissent alors le monde, une légende est née…
La dénonciation des mensonges des médias, du capitalisme galopant, du racisme et des inégalités sont des sources d’inspiration constantes pour Zack de la Rocha. Beaucoup se reconnaissent dans ses textes qui portent la force pure et brute du rap, l’énergie hardcore des années 1980 (de la Rocha était le frontman du groupe hardcore Inside Out), et la vigueur contestataire de la musique folk. Jonglant avec les mots et se permettant même de s’abstenir de rimes, ce sympathisant zapatiste dépeint un monde qui ne peut aboutir qu’à la révolution. De la Rocha évite les clichés et démontre qu’il connaît de façon profonde les sujets qu’il aborde (« Bombtrack »), son talent d’écriture est unanimement reconnu. RATM est ainsi la preuve qu’un groupe peut demeurer libre malgré sa signature sur une major (Sony Music).
Militants d’extrême-gauche dans un pays encore profondément maccarthyste, les quatre musiciens se heurtent à l’establishment, cette Amérique blanche toute puissante et bien pensante. Dès ce premier album éponyme, Rage Against The Machine porte ainsi une lourde responsabilité, celle de faire jaillir aux yeux des victimes de l’apathie générale les injustices que subissent sans cesse les minorités, les exclus et les véritables défenseurs des libertés individuelles et collectives. Ouvertement opposé à la politique menée aux États-Unis, le quatuor est régulièrement accusé de traîtrise et est même diabolisé par certaines communautés religieuses, comme les Amish pour qui le groupe et la ferveur qu’il suscite sont devenus des symboles méphistophéliques…
Novateur dans la forme, sans compromis dans le fond, Rage Against The Machine devient, en un album, un groupe indispensable, vital même pour toute une génération. Le quatuor fonde un genre, un style qui lui est propre et reconnaissable entre mille, une musique avec laquelle le reste du monde devra désormais vivre. La révolution est en marche et ce n’est que le début…
.: Tracklist :.
01. Bombtrack
02. Killing In The Name
03. Take The Power Back
04. Settle For Nothing
05. Bullet In The Head
06. Know Your Enemy
07. Wake Up
08. Fistful Of Steel
09. Township Rebellion
10. Freedom
Pour écouter : www.myspace.com/ratm